Commencer ce blog est une épreuve pour moi. Voila des années que je n’ai plus écrit « personnellement ». Après avoir tenu un égo-blog exutoire et particulièrement jouissif pendant mes années folles de trentenaire célibataire, jouant au Bé-Bégebedier amateur et en avoir récolé quelques succès et quelques joies, je m’étais reclus dans un silence sérieux dans la discrétion duquel je suis devenu tout à tour, la moitié d’un beau couple, l’auto-entrepreneur de ma nouvelle vie professionnelle indépendante, un ex-citadin déraciné à la campagne, le père ému d’un, puis de deux merveilleux petits garçons.

J’ai donc le sentiment que ce n’est plus vraiment la même personne qui prend aujourd’hui le clavier, tant ces mutations furent profonde et tant ma vie d’aujourd’hui tranche drastiquement avec celle qu’elle fut hier, alors que je bloguais frénétiquement en racontant mes virées et mes émois.

Ce sentiment de décalage tient aussi et surtout dans le caractère « professionnel » que j’entends donner à ce blog. A l’inverse de beaucoup, il m’apparait comme bien plus angoissant de m’aventurer sur les sujets pro que perso, le risque me semblant plus grand d’égratigner mon image qui, en tant qu’indépendant, fait partie de mon capital.

Il me faudra donc trouver mes marques peu à peu. Mais l’immense avantage d’un nouveau blog, c’est de ne pas encore avoir la moindre audience et donc personne encore pour me juger.

Ce qui m’amène au sujet du jour : Au commencement était la Valeur. En décidant d’ouvrir ces pages, c’est là le fond de mon angoisse, j’ose affirmer que mon avis, ma vision des choses recèle une Valeur suffisante que pour être publiée sous le couvert de mon activité professionnelle. Ce faisant, je mets fin à une sorte de période d’essai professionnelle pour me reconnaitre, après 5 ans d’exercice, comme un consultant formateur et accompagnant expérimenté et capable.

Il n’y a là aucune vanité, juste un fait. Depuis 5 ans je tire ma subsistance financière, rationnelle et émotionnelle de mon métier et je peux affirmer la valeur de ce que je fais.

Et c’est bien ceci que je voudrais souligner : vous devez croire en votre Valeur ! C’est sans doute la plus grosse lacune, le plus gros défaut de chacun d’entre nous. Croire en soi, en ce que l’on est capable de faire, de réaliser. La dévalorisation est devenue, à cet époque, un mode de pensée en plus d’être un mode de consommation.

Il est légitime que vous puissiez avoir des doutes sur la valeur de ce qui vous entoure, mais il est primordial que vous puissiez retrouver la certitude de votre Valeur personnelle et travailler à l’affirmer, en paroles et en actes, dans vos loisirs ou dans vos activités professionnelles, en créant votre job ou tout simplement en menant à bien vos taches régulières, en ayant une conscience propre de votre compétence et de votre implication.

Trop souvent je retrouve des personnes intéressantes et très capables dans l’une ou l’autre de ces deux postures de dévalorisation. :

Le résigné, coincé dans une forme pernicieuse d’immobilisme qu’il estime sécurisante, semble avoir depuis longtemps renoncé : « c’est comme ça », me dit-il, « on ne peut pas toujours faire ce qu’on veut » ajoute-t-il en passant sous silence que « pas toujours », chez lui, c’est « quasiment jamais ». Il ne se reconnait pas de valeur individuelle et construit sa valeur professionnelle sur sa longévité et ses acquis. Il décrit souvent son travail comme « alimentaire » et vise au strict maintien de cet univers professionnel qu’il jugera forcément menacé par toute velléité de changement de la part de tous ses collaborateurs, tout niveau hiérarchique confondu.Il a des loisirs, sans doute même une forte activité sociale, mais sliote (du néologisme très parisien « Siloter » – mettre en silo – compartimenter) de façon très nette le « travail » jugé comme un mal nécessaire, et le reste de sa vie. Il n’a pas de projets professionnels, ou peu s’en faut, et a de grande difficultés a adhérer a ceux de l’entreprise ou de l’organisation qui l’emploie. Il n’est pas rare d’ailleurs qu’il les juge avec un cynisme féroce ou les sabote, passivement ou activement. Même a ses propres yeux, sa carrière est « grise ». Au mieux, il terminera une préretraite confortable dans un petit bureau d’entresol, entre une photocopieuse et la fontaine à eau. Au pire, sa volonté de statu-quo dans une monde en accélération perpétuelle lui vaudra une désagrégation lente et douloureuse de la valeur de ses années de services, qu’il nomme « expérience » mais qui sonne plutôt comme « historique » aux oreilles de ceux qui auront, en le manageant, a lui trouver une place dans une structure en forte évolution, souvent contre son gré.

Le dépendant, au contraire, peut faire montre d’une énergie formidable et d’une grande ambition. Il veut. Mais souvent il ne peut point. Car c’est là que son paradoxe se noue : il est incapable de reconnaitre sa valeur tant qu’elle n’a pas été validée par autrui, comprenez de préférence par le Chef, le Grand Chef ou un Référent, un père de substitution. Il ne cherche pas à se fonder sa propre valeur, il cherche à ce que cet éclat qui semble désespérément échapper à son propre regard lui soit renvoyé par celui de son bien aimé Tuteur. Hypersensible à la critique, qui le pousse jusqu’aux larmes et à la détestation (tant de lui-même comme de celui qui lui refuse sa valorisation) mais étrangement gêné par le compliment (qu’il ne peut valablement accepter puisqu’il ne se reconnait lui même que peu de valeur) il sera toujours tout en efforts et tout en attentes, souvent déçues. Car hélas, il attire souvent à lui, en guise de « Maitre » des personnes peu scrupuleuses et heureuses de trouver là une force de travail et une motivation abondante et peu couteuse. Un peu de pommade et quelques remontrances judicieusement alternées lui serviront de salaire jusqu’à l’épuisement de ses ressources morales. Il rêve d’un jour marcher dans les pas d’un Mentor bienveillant mais ne le reconnait pas quand il se présente, et pour cause, tout Mentor bienveillant vise a l’autonomisation et à la responsabilisation individuelle, et non pas à passer du Sauveur Providentiel au Persécuteur pour mieux asseoir sa domination et sa satisfaction personnelle.

Bien entendu, c’est ma façon de faire, le trait est ici forcé jusqu’à la caricature, par ce qu’elle permet à ceux qui pourraient s’y reconnaitre d’en rire ou d’en avoir peur. Deux émotions qui visent à dépasser la simple « compréhension » de la situation.

Or, sauf cas extrêmes, rien n’est perdu, pour l’un comme pour l’autre, l’essentiel étant de travailler à fonder sa valeur personnelle, sans se juger ni se laisser juger, mais en s’évaluant, objectivement, rationnellement, sur chaque kilomètre parcouru, chaque pierre soulevée, chaque question résolue, chaque challenge relevé, en se disant simplement « J’ai fait cela, je peux le refaire, je peux même faire mieux, je peux même faire d’avantage ». Petit morceau concret par petit morceau concret, une confiance, une Valeur peut se construire, même en partant de peu.

Au résigné, je propose de retrouver, n’importe où dans son histoire, ses grands moments de fierté, de retrouver cette ressource enfouie et de rechercher à l’activer.
Au dépendant, je propose d’essayer de marcher sans béquille et de se regarder faire, afin qu’il comprenne que la béquille ne compensait pas un handicap, mais qu’elle était elle-même le handicap.

Quelle que soit votre situation, vous avez une Valeur inestimable. Vous êtes munis, à 99,99999% des mêmes dispositions que tous les grands qui ont changé le monde, les arts, les sciences, les lettres. Vous pouvez TOUT faire à condition de le désirer et vous pouvez également choisir de ne RIEN faire. Et c’est la que réside la vraie magie ; il s’agit de votre premier pouvoir, celui qui enfante de tous les autres; choisir !

Je n’ai encore jamais vraiment croisé la route d’un résigné ou d’un dépendant qui m’a confié avoir choisi sa situation. Tous, avec des expressions variées, m’ont avoué la subir. Reconnaitre sa valeur est donc d’abord et avant tout un choix personnel, un chemin dans lequel on s’engage seul, mais au long duquel il n’est pas rare d’être rejoint par ceux qui, confiants dans leur valeur propre, savent apprécier avec bienveillance et sans rivalité celle d’autrui.

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