« Mais où es-tu ? «
Voilà une parenthèse de sept mois qui se termine aujourd’hui. Hier c’était sa dernière séance de rayons. Fini les tatouages disgracieux qui la privaient de piscine ou d’échancrures. Depuis la fin de la cure, ses cheveux ont joliment repoussé. Une coupe à la garçonne qui lui va, en définitive, formidablement bien. Le sourire, lui aussi, est revenu s’installer durablement sur son beau visage.
Et enfin, surtout, c’est tout un vocabulaire et une grammaire qui change, qui revient, qui n’englobe plus « ça », ce truc là, qui bouffe le corps comme l’esprit, dévore les projets, mine les agendas et suspend tous les plans ! Une nouvelle conjugaison que nous osons aujourd’hui enfin accorder au futur simple et souvent même au futur beau.
Ces mots sont d’abord un hommage au courage, à la force et à la détermination de celle qui est depuis 11 ans ma formidable partenaire dans l’entreprise la plus importante de ma vie ; ma famille.
« Mais où es-tu ? »
J’étais là, pas loin. Silencieux, confondu dans l’ombre que la maladie a jeté sur ma famille pendant sept longs mois. J’étais pleinement investi sur cet autre front, plus confidentiel, plus intime, plus feutré et tellement plus essentiel. Pas absent, mais plutôt « socialement suspendu », tentant d’encaisser avec elle, cet aléa et ses conséquences sur notre petite famille et nos métiers respectifs.
Car voyez vous, nous sommes tous les deux indépendants libéraux. Et si beaucoup de nos amis salariés nous envient souvent cette sorte de liberté, cette absence de patron et cette drôle de passion quand nous parlons de notre boulot, on mentionne pourtant moins fréquemment le coté obscur de l’indépendance et de l’entrepreneuriat, cette absence d’acquis, de filet de sécurité réellement solide en cas de pépin. Chaque arrêt de travail est un arrêt direct de revenu et un gap de volume de commandes à venir qui se répercutera inévitablement sur les prochains mois.
La maladie, en l’occurence, ne touche pas que les corps et les esprits, elle peut, dans nos situations, venir handicaper durement les activités professionnelles, ajoutant au passage de l’inquiétude à l’inquiétude, du stress au stress.
Au final nous nous en sortons sans trop de casse, elle et moi, malgré les traitements lourds. Quelques jours de repos cet été nous feront un bien fou avant de nous relancer à corps et à coeur perdu dans nos boulots.
Voila où j’étais !
Et je suis en train de revenir, plus déterminé que jamais à profiter de la vie et à m’épanouir personnellement, familialement et professionnellement.
Mais en attendant, je profite de ce petit mot pour exhorter tous mes amis indépendants, artisans, auto-entrepreneurs, fondateurs, chefs d’entreprise et consorts à prendre les devants et à envisager les précautions nécessaires qui vous permettraient de ne pas faire de votre boite et de vos projets les victimes collatérales d’un problème sérieux de santé que vous pourriez rencontrer. Ca n’arrive pas qu’aux autres et ça frappe toujours sans prévenir au pire moment.
Profitez de cet été pour en parler avec votre courtier, votre banquier, votre caisse sociale. Renseignez vous sur tous ces points. Allez aborder calmement de front les questions de revenus garantis, d’assurance fond de roulement, de complémentaires santé. Jouez un instant à vous faire peur en commençant par un « Et si quelque chose de grave m’arrivait ?». Votre métier vous pousse souvent à prévoir pour diriger, à aborder des stratégies moyen à long terme pour assurer la bonne continuité et la croissance de vos affaires.
De grâce, prenez en considération cet angle obscur dans lequel aucun d’entre nous n’a franchement envie de regarder. Soyez prévoyants, même si vous vous pensez indestructibles et éternels. Si vous ne le faites pas pour vous, faites le pour la sérénité de vos familles et la continuité de tout ce que vous avez entrepris et construit! !
Et puis, de grâce aussi, tout occupés que vous soyez, planifiez vos contrôles, vos rendez-vous de santé. J’en connais certains qui évitent de monter dans un avion de peur d’un crash ou d’un attentat tout en repoussant depuis des mois un examen clinique pourtant crucial. Il y a une rationalité à récupérer en la matière !
La Maladie n’est pas un sujet dont on parle en business. Et c’est un tabou qu’il faut absolument lever. Parce qu’elle y existe et qu’elle nous impacte bien plus durement qu’une crise financière ou que l’émergence d’un concurrent agressif.
Etre bon avec soi-même, prendre soin de soi et de sa santé, faire preuve de prévoyance à cet égard sont autant de qualités essentielles que doit, à mon sens, développer tout professionnel responsable.
Prenez-soin de vous !